NOUS SOMMES L’OEUF: 5 leçons apprises…d’une pro rénovant sa demeure
Cette semaine à NOUS SOMMES L’OEUF, dans notre série « 5 leçons apprises », Amy nous raconte ses aventures en rénovations. Elle et son mari ont acheté en 2019 un shoebox dans Rosemont et entreprennent aujourd’hui d’y ajouter un étage afin de les héberger avec leur fille, Sienne, et leur chien, Oscar. Amy s’est livrée à nous sur les quelques compromis qu’elle a dû faire, les réflexions de couple et les surprises qui les attendaient.
Fière collaboratrice à L’OEUF depuis plusieurs années, Amy est titulaire d’un doctorat en aménagement et possède une expertise particulière sur les « sustainability frameworks ». Elle divise aujourd’hui son temps entre la pratique de l’architecture, la recherche et l’enseignement. Chez L’OEUF, Amy a travaillé sur de nombreux projets de consultations citoyennes et Processus de Conception Intégrée. Amy a également fait partie de l’équipe gagnante du concours C40 Montréal remporté par le bureau en 2019.
Voici son témoignage.
Première leçon : Préparez-vous au pire, mais demeurez flexibles.
« Il y aura toujours des surprises sur le site et des choses auxquelles vous ne pourrez pas être préparées. Vous aurez à vous adapter. Par exemple, la chose qui nous a donné le plus de maux de tête est le mur de maçonnerie le long de l’allée du stationnement, où nous avons découverts des blocs de béton en très mauvais état. Nous avons dû renforcer le mur et installer une plaque en acier soudée à notre structure intérieure en acier pour supporter le poids des blocs à l’étage. Le tout est devenu un pont thermique pouvant causer de la condensation à l’intérieur du mur. Nous avons donc dû revoir la composition au complète de ce mur dans nos plans. »
Deuxième leçon : Prévoyez l’avenir.
« C’est quelque chose que j’ai appris en travaillant à L’OEUF depuis de nombreuses années, et que j’ai pu appliquer à nos rénovations. En résumé, l’idée de « futureproofing » vous permet de planifier des stratégies de durabilité futures (ou autres) que vous ne pouvez pas vous permettre maintenant, mais que vous voudrez peut-être facilement mettre en place dans l’avenir. Par exemple, nous avons préparé notre sous-sol afin d’accueillir un éventuel réservoir d’eau de pluie intérieur. Il s’agit d’un produit de l’Ontario qui vient d’être breveté, il n’est donc pas encore disponible. Afin de nous préparer à sa réception, nous avons évité de faire courir le chauffage radiant du plancher dans la zone où se trouvera le réservoir – car se sera évidemment un réservoir très lourd. Nous avons également séparé la plomberie sanitaire du reste de la plomberie, afin que l’eau de pluie puisse éventuellement être utilisée pour évacuer l’eau des toilettes. Cela n’a coûté immédiatement que quelques centaines de dollars en tuyauterie, alors que le réservoir lui sera beaucoup plus cher. Nous commanderons donc le réservoir lorsque notre budget le permettra. Et quand ce sera le cas, la maison sera prête à le recevoir sans frais supplémentaire autrement que son achat. »
Troisième leçon : Entretenez de bonnes relations humaines.
« Établissez de bonnes relations avec vos voisins. Annoncez-leur vos plans de rénovations d’avance et voyez avec eux comment vous pourrez leur rendre la vie plus facile. C’est perturbant pour eux, alors vous voulez être prévenant. Faites-le, d’autant plus que vous aurez certainement à leur demander des faveurs, comme de bouger leurs voitures pour faire place à un container à déchets ou à une grue! (rires)
Privilégiez aussi une excellente relation avec votre entrepreneur. Bâtir une confiance mutuelle est nécessaire pour les moments où les choses se corsent et que vous aurez des décisions importantes à prendre. Vous voulez pouvoir vous fiez à votre entrepreneur. Ne laissez jamais une situation se détériorer.
Ayez également une coordination très étroite avec lui. Surtout au début, asseyez-vous avec votre entrepreneur et expliquez-lui vos priorités. Passez en revue tous vos détails atypiques qui lui causeront des maux de tête. Nous avons de très bons entrepreneurs, et ils font un travail formidable, mais ils n’étaient pas habitués à travailler avec certains des détails que j’avais dessinés. Je me suis assuré d’entendre leurs préoccupations et j’ai apporté des modifications en conséquence. Dans le cas contraire, si vous êtes plutôt passif et vous ne faites que leur envoyer vos dessins en pensant qu’ils seront capables de comprendre ces nouveaux détails qu’ils n’ont jamais construits auparavant… les choses ne se passeront probablement pas comme vous l’espériez !
Pour revenir à mon exemple du mur de blocs de béton qui a causé beaucoup de maux de tête, je me suis creusé la tête en essayant d’améliorer le problème de pont thermique créé par la plaque d’acier, en recherchant des cornières thermiquement brisées et des blocs en cellule de verre. Après avoir discuté avec un collègue, j’ai finalement décidé de ne pas trop compliquer les choses avec des délais et des détails qui pourraient fragiliser la relation avec mon entrepreneur, et j’ai opté pour quelques solutions « low-tech » afin améliorer le détail. »
Quatrième leçon : En gestion de risque, priorisez l’eau à l’énergie.
« Ce point a été une très bonne leçon pour moi-même. Nous avions initialement prévu d’atteindre la norme Passivehouse et j’étais tellement concentré sur les enjeux de performances thermiques, alors que maintenant ma perspective a vraiment changé et je pense que l’eau / l’humidité est un enjeu bien plus effrayant, puisque les impacts en termes de dommages à votre structure et à votre santé sont plus sévères! Traiter les problèmes d’eau et d’humidité est, je pense aujourd’hui, une gestion des risques beaucoup plus importante à considérer. Après avoir travaillé avec 475 High Performance Building Supply, qui offre des analyses WUFI*, nous avons décidé de louer des déshumidificateurs industriels pour tout sécher et nous chaufferons la maison avant que le gypse ne soit posé. La simulation que notre fournisseur a faite sur un mur en particulier a démontré que si nous fermions ce mur avant que la structure en bois ne soit complètement sèche, on se retrouverait avec le potentiel de beaucoup de moisissure. Je conseille donc de se faire un plan de gestion de risque avant la construction pour minimiser l’entrée d’eau. Et pour lorsqu’elle entrera inévitablement, assurez-vous d’avoir prévu un budget et suffisamment de temps pour permettre de tout sécher. Bien sûr, envisagez de bons détails minimisant le risque d’accumulation de la condensation dans vos murs; particulièrement aux endroits où la condensation ne pourrait pas être évacuée ou séchée.
* WUFI est un programme informatique qui peut indiquer comment l’humidité et le flux de chaleur affectent les matériaux de construction au fil du temps.
Cinquième leçon : Appréciez l’instant présent.
« Un jour, cet automne, il faisait chaud et ensoleillé. L’entrepreneur venait de terminer la construction des murs du deuxième étage et je suis montée pour voir l’espace pour la première fois dans cette magnifique lumière d’automne. Je pouvais enfin imaginer ma famille vivre dans ces lieux. Je peux juste vous dire, de pouvoir enfin ressentir et imaginer l’espace, j’ai eu un vrai sentiment d’euphorie. Et bien sûr, je chéri les souvenirs des soirées passées à concevoir notre future maison avec mon mari. J’étais enceinte à l’époque, rendant ces souvenirs encore plus spéciaux. Un autre moment amusant a été lorsque nous avons vu la grue soulever l’acier sur le site. C’était très excitant! »